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© Mathieu Baconnet - Parc national des Cévennes
Les îlots de sénescence constituent un critère de gestion durable d’une forêt. En partenariat avec l’ONF, 1200 hectares d’îlots ont été mis en place dans les forêts publiques du coeur de Parc. Dans le cadre du projet « forêts anciennes » coordonné par l’association des parcs naturels du massif Central (IPAMAC), les propriétaires forestiers privés ont eux aussi été sensibilisés aux bénéfices de la trame de vieux bois.

Une trame de vieux bois se définit en trois échelles spatiales. Il s’agit tout d’abord des arbres d’intérêt écologique. Ils peuvent être dépérissants ou morts mais ce sont aussi des vivants, en pleine force de l’âge, et porteurs de bois mort, par exemple de très gros arbres perclus de cavités.

L’îlot de senescence constitue le second niveau et s’étend sur 3 à 10 hectares. Il joue un rôle intermédiaire entre les arbres isolés et la forêt en libre évolution composée de 30 à plus de 300 ha qui constitue le dernier niveau. Aucune intervention humaine n’est effectuée sur ces 3 niveaux, les arbres évolueront spontanément jusqu’à leur chute et leur désagrégation complète.

Quel intérêt ? La plupart des espèces forestières, tous règnes confondus, sont liées au bois mort et sénescent. Ainsi la trame de vieux bois, par le maintien de vieux arbres et de peuplements sénescents, permet donc d’accueillir une plus grande biodiversité et favorise la connectivité écologique des paysages, condition sinequanone de sa conservation : les espèces peuvent facilement circuler, trouver un nouvel habitat naturel, s’apparier avec des individus d’autres populations et coloniser des forêts gérées.

Les arbres matures constituent un habitat favorable pour les lichens comme le Lobaria amplissima qui vit en symbiose avec deux algues ou des plantes épiphytes à l’image de la fougère Réglisse des bois (Polypodium vulgare), sans oublier les myriades de champignons qui les recouvrent. Les arbres sénescents ou morts font le régal des larves de nombreux coléoptères dits saproxyliques : la Rosalie des Alpes (Rosalia alpina), le Lamie tisserand (Lamia textor) ou le Pique-prune (Osmoderma eremita).

 

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Pique-prune © Jean-Pierre Malafosse - Parc national des Cévennes

 

« Ce dernier affectionne les cavités des vieux et gros arbres et son observation témoigne de la présence du cortège complet d'espèces attendu pour ce type de vieille forêt », précise Sandrine Descaves, technicienne « forêt » au Parc. La présence de ces insectes et de toute la chaîne alimentaire qui en découle permet la régulation des ravageurs. Les arbres en décomposition fertilisent le sol et améliorent ainsi la régénération de la forêt et donc sa résistance.

 


3 critères pour installer un îlot de senescence

 


Dans le cadre du projet « forêts anciennes », des propriétaires forestiers privés du coeur de Parc mais également de l’aire d’adhésion, avec la collaboration du CNPF, ont été sensibilisés à la mise en place d’îlots de sénescence afin qu’ils maillent progressivement le territoire du Parc. Des échanges ont eu lieu, lors de la réalisation de diagnostics écologiques par les techniciens « forêt » du Parc, en vue de la conception de leur plan simple de gestion, un document obligatoire pour les forêts de plus de 25 ha.

La mise en place d’un îlot de sénescence s’effectue selon trois critères. « Il faut tout d’abord prendre en compte la forêt en elle-même. Dans l’idéal, elle doit être composée d’essences autochtones, de gros bois avec des micro-habitats et elle peut avoir fait l’objet d’une coupe si elle est ancienne », explique Hervé Caroff, chef du pôle forêt du Parc. Le second critère prend en compte l’aspect économique. « Un propriétaire privilégiera davantage une zone moins accessible pour pouvoir continuer d’exploiter le reste de sa parcelle ». Le troisième critère concerne la répartition de ces îlots, ils doivent mailler la forêt.


 

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Arbre d'intérêt écologique dans un îlot de sénescence © Mathieu Baconnet - Parc national des Cévennes
Témoignage

Jean Veyrier, propriétaire de la forêt du Faïsse des Mazes à Lanuejols (30)

« Cette forêt dont je suis propriétaire depuis 2 ans s’étend sur 14 ha en bordure du causse Noir et des Cévennes. Elle existe depuis 1910 et était associée à une ferme qui l’exploitait pour le bois de chauffage. Elle n’est plus gérée depuis 1960, année où elle a subi une coupe rase. Je me suis intéressé à la gestion durable lors d’une réunion organisée par Natura 2000 et le CRPF.
Suite à la visite du CRPF et du Parc national qui a réalisé un diagnostic écologique de ma forêt, une quinzaine de vieux arbres ont été identifiés afin d’être conservés et un îlot de senescence de 1,5 ha a été mis en place à proximité d’une forêt de l’ONF. Cet îlot se compose notamment de chênes, de hêtres et de pins sylvestres. Le reste de la forêt est géré en futaie irrégulière. Une coupe d’éclaircissement a d’ailleurs été effectuée à l’automne.
Le plan simple de gestion n’est pas obligatoire pour ma forêt mais j’ai choisi d’en élaborer un. Dans ce cas, il sera subventionné par le Parc national ».

 

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Cet article est extrait du dernier numéro du magazine du Parc "De Serres en valats". Son Grand Angle vous permettra de découvrir le formidable outil des Atlas de Biodiversité Communale. Vous pouvez le télécharger sur notre site en cliquant sur ce lien.

 

 

Pour aller plus loin :


Source URL: https://www3.cevennes-parcnational.fr/actualites/des-forets-privees-plus-resilientes-grace-la-biodiversite