Jeudi 9 juin, le Parc national des Cévennes a organisé une journée de formation "Land Art ou l’art dans la nature" sur le Mont Aigoual afin de faire découvrir le sentier des balcons de l’Aigoual aux professionnels du tourisme.
L'artiste Céline Pialot a accompagné les participants pour une découverte sensible du parcours.
L'occasion de découvrir comment l’art qui s’insère dans la nature revient à une source essentielle de la création artistique : l’observation et l’inspiration, auxquelles se rajoutent ici les contraintes d’installation dans un espace protégé.
Nous vous proposons un tour d'horizon de quelques unes des oeuvres que vous pourrez observer en 2022 !
Les balcons de l'Aigoual
Le sentier des balcons de l’Aigoual est un projet unique en cœur de parc national. Il révèle 14 installations artistiques régulièrement renouvelées s’inspirant de la nature et des paysages de l’Aigoual.
Ici, des artistes mettent en scène la relation humain/nature et la confrontation aux phénomènes climatiques de l’Aigoual. Les œuvres évoluent donc, forcément, en permanence. Ce parcours permet de traverser des ambiances et des lieux différents en suggérant à chacun une approche sensible et intime de la nature.
Ouvert à tous et libre d’accès, ce sentier est situé au sommet de l’Aigoual et sur les communes environnantes. Il se déroule sur 7 km et débute au niveau de la station de Prat Peyrot, en direction de l’Aigoual. Le sentier balisé permet également de choisir de plus petites boucles.
Il est le fruit d’un beau partenariat qui rassemble la Communauté de communes Causses Aigoual Cévennes Terres Solidaires, le Parc national des Cévennes, l’Office national des forêts et la Filature du Mazel depuis 5 ans.
« L’orée » de Yohan Crépin
Comme une invitation à découvrir un monde différent, « L’orée » représente une voute réalisée à partir de bois morts, qui marque le début du parcours. Construite à même le sentier, elle se veut bienveillante et réconfortante à l’égard de ses hôtes, comme un oiseau construirait son nid. Céline Pialot a confié aux participants qu’il s’agissait de son œuvre préférée... tandis que certains participants s’amusaient à comparer l’œuvre à un portail temporel tout droit sorti d’un film de science-fiction.
Et si c’était le cas ?
« Bassin versant » de Xavier Rèche
Cette œuvre dont le nom rappelle le milieu marin est en fait un écho à la ligne de partage des eaux Atlantique/Méditerranée, située à quelques centaines de mètres. Posée en contrebas du chemin, elle s'inspire des charpentes de bateaux et nous rappelle les nombreux liens qui unissent l’Aigoual et la mer. Outre cette notion de bassin versant, le Mont Aigoual est également le premier haut relief en venant de la mer. Une mer que l’on peut d’ailleurs voir depuis le sommet, malgré les 75km qui les séparent !
Discrète, l’œuvre peut passer inaperçue si l’on ne prend pas la peine de la chercher…
« Tout là-haut » de Guth Joly
Se détacher de son enveloppe charnelle pour laisser notre esprit accéder à l’au-delà, se sentir oiseau, toucher les nuages…
Libre à soi d’interpréter comme on veut ces échelles, fragilement accrochées aux troncs des arbres de la forêt.
Céline Pialot se contente de donner des pistes d’interprétations pour chaque œuvre et c’est bien sûr à chacun de décider ce qu’il y voit. Certains retrouvent leurs souvenirs d’enfance avec un clin d’œil aux cabanes qu’ils construisaient tandis que d’autre y voient une invitation à découvrir la faune qui se cache dans la canopée.
« Plein souffle » de Xavier Rèche
Impressionnante et immanquable, cette structure semble flotter dans son milieu.
En effet, les cordages discrets qui permettent à cette œuvre de se maintenir en l’air donnent l’impression d’assister à une véritable explosion figée dans le temps.
Comme le laisse sous-entendre son nom, « Plein souffle » est une représentation de ce flux invisible qu’est le vent. Puissant et imprévisible, son chant résonne parfois des jours durant sur les flancs de l’Aigoual…
« Coupe-feu », œuvre anonyme
La réalisation "Plein souffle" de Xavier Rèche est traversée par une oeuvre bien plus monumentale, qui peut se voir depuis les montagnes avoisinantes ou par avion… il s’agit de « Coupe-feu », qui n’est ni plus ni moins qu’une bande de terre d’une dizaine de mètres de large et de plusieurs centaines de mètres de long !
En réalité, le coupe-feu a été réalisé par des agents de l’ONF dans le but de lutter contre les incendies. Il s’agit d’une parcelle qui sépare en deux la forêt pour ralentir la progression d’un feu.
Ce n’est que des années plus tard, en 2018, que l'artiste Paula Anke l’a définie comme une œuvre d’art à part entière.
« Les nids » de Céline Pialot
Quelle chance d’avoir une artiste comme guide du jour pour cette formation ! En effet, Céline Pialot, qui est à l’origine de cette œuvre, a pu expliquer à tous la démarche artistique qui se cache derrière ces fameux « nids ».
A l’instar de l’oiseau, elle a créé son œuvre avec des branchages offerts par la nature. Cependant, elle a volontairement choisi de ne pas fermer le nid pour inviter les gens à rentrer dedans : car oui, l’art "in situ" se caractérise également par son aspect vivant et participatif.
« Arbre-feuille » d’Alain Bernegger
Discrètes, les « arbres-feuilles » sont des œuvres d’art poétiques qui mettent en scène un élément naturel en format XXL.
Ces derniers utilisent la structure nervurée caractéristique des feuilles pour établir une résonance graphique entre l’arbre et ces dernières. Le changement d’échelle interroge et met en valeur une partie de l’arbre qui jonche le sol à la basse-saison, mais qui continue de vivre à travers le travail d’Alain Bernegger.
« Réseau » de Gilles Bruni
Céline Pialot nous explique que cette œuvre très abstraite dévoile pour elle un message en forme d'ode à la nature. « Réseau » est une représentation de toutes les connexions qui se font entre les différentes espèces qui composent une forêt, les entrelacements de branches étant un écho à cet écosystème à la fois riche et fragile.
Les réseaux qui la constituent sont des passerelles dans lesquelles l'énergie circule pour que l'ensemble puisse subsister et faire "forêt".
L’installation porte ainsi en elle le message de la vulnérabilité de cet équilibre.
« Gardien des bois » de Raphaël Daynié
Peut-être l’œuvre la plus figurative du parcours, cet impressionnant géant boisé de près de 3 mètres de haut semble veiller sur la forêt entière.
Entièrement construit avec du bois mort ramassé aux alentours de son lieu d’exposition, il symbolise l’impossible union entre l’homme et la nature, à l’ère de l'anthropocène.
Nous vous invitons maintenant à partir à la découverte de ces oeuvres et de toutes celles qui ne sont pas mentionnées dans l'article pour trouver vos propres interprétations et porter un nouveau regard sur le mont Aigoual !
Le land-art, quésako ?
Branche de l'art contemporain, le land-art contraint l’utilisation d’un cadre et de matériaux issus de la nature (bois, terre, pierres, sable, eau, rocher, etc.). Le plus souvent, les œuvres sont situées en extérieur, exposées aux éléments et soumises à l'érosion naturelle ; ainsi, certaines œuvres disparaissent, continuant de vivre à travers le souvenir de ceux qui les ont vus…
Concernant les œuvres exposées sur le Mont Aigoual, Céline Pialot préfère utiliser l’expression In situ plutôt que celle du land-art. Bien qu’étant complémentaire, l’œuvre in situ va être entièrement dédiée à son lieu d’accueil, et n’est, par conséquent, pas transportable. Dans le cas de l’exposition de Prat Peyrot, les œuvres se fondent dans leur environnement, au point de parfois passer inaperçues…
Pour aller plus loin :