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Le mont-Lozère est connu pour ses paysages, son activité agricole ainsi que ses formidables patrimoines naturels et culturels. Mais c'est aussi un lieu de recherche qui mobilise et passionne les chercheurs.

Depuis l'Université de l'Illinois, jusqu'au CNRS ou la Sorbonne, des scientifiques y mènent des études avancées pour mieux comprendre notamment l'évolution du climat, l'érosion ou encore anticiper la gestion des crues.

Pierre-Alain Ayral, ingénieur de recherche au CNRS et membre du conseil scientifique du Parc national des Cévennes et Julien Bouchez, chercheur à l'Institut de Physique du Globe de Paris, nous présentent un aperçu de ces travaux.

 

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La station météorologique de la Vialasse a été installée sur la ligne de partage des eaux Atlantique – Méditerranée dans les années 1980 par le CNRS. © Adrien Majourel - Parc national des Cévennes

 

Un suivi sur le long terme et des champs de recherches variées

Débuté en 1981, le suivi des bassins versants expérimentaux du Mont Lozère se poursuit aujourd’hui encore sur 5 bassins versants de 0.3 à 15 km² et une station météorologique installée à proximité du hameau de La Vialasse :

 

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Avec au départ l’objectif de suivre un bassin versant témoin face aux épisodes d’acidification (pluies acides) qui impactaient dans les années 1980 l’Europe de l’Est, de nombreux projets de recherche ont été développés sur ce site notamment sur :

  • les flux hydro-sédimentaires et l’érosion (Allée et al., 2004; Martin et al., 2002),
  • le rôle hydrologique des tourbières (Cognard-Plancq et al. 2004; Martin et al., 2007),
  • le rôle de la forêt sur le débit des rivières (Didon-Lescot, 1996; Cognard-Plancq et al., 2001),
  • les processus de genèse des crues (Cosandey, 1994; Martin et al., 2004)
  • les processus contrôlant la qualité des eaux (Dupraz, 1984; Lelong et al., 1990; Marc and Robinson, 2004; Girault et al., 2021; Fernandez et al., 2022; Golla et al., 2024).

 

Des études qui nourrissent les recherches pour anticiper le changement climatique

Ce jeu de données hydro-météorologique de plus de 40 ans pour certains bassins versants a été récemment analysé par des étudiants d’IMT Mines Alès (Dolaïs et al., 2020) et de l’Université de Montpellier (Kuznik-Corre et al., 2022) pour alimenter les réflexions du Parc national des Cévennes sur l’impact local du changement climatique (GREC-Sud and RECO, 2020) et dans le cadre du projet Natur’Adapt visant à développer un plan d’adaptation face au changement climatique (Parc national des Cévennes, 2022a, 2022b). Il constitue ainsi une ressource d’intérêt pour le territoire d’autant qu’il reste de nombreuses recherches à construire autour de ce dernier.

 

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Pendant près d'un an, le GREC-SUD et le RECO ont mobilisé plus de 50 chercheurs régionaux de différentes disciplines des sciences de la terre, de la nature et des sciences humaines et sociales ainsi que de nombreux acteurs locaux pour produire le cahier thématique "Adaptation du PNC au changement climatique et à ses impacts" © Arnaud Bouissou - Parc national des Cévennes

 

L’évolution de la température de l’eau n’a pas, par exemple, encore été étudiée. De même, cette base de données pourrait être croisée avec d’autres paramètres, en lien notamment avec l’évolution de la biodiversité (terrestre ou aquatique), de l’occupation du sol pour mieux caractériser les effets du changement climatique en cours sur le territoire du Parc national des Cévennes.

 

Comprendre comment l’eau interagit avec les roches et les écosystèmes

Les autres études en cours s’attachent à comprendre comment les réactions chimiques entre les roches, les sols et l’eau de pluie (ou la neige fondue) s’infiltrant dans la subsurface contribuent à la chimie des cours d’eau, et comment ces interactions sont modulées par le couvert végétal. Ces initiatives requièrent de mieux contraindre les processus suivants dans les bassins versants étudiés :

  • le traçage des chemins de l’eau dans la subsurface et jusqu’à leur arrivée dans les cours d’eau :

L'Institut Physique du Globe de Paris (IPGP), accompagné de Sorbonne Université (UMR METIS), de l’Université de l’Illinois et de l’UMR ESPACE ont conduit des travaux pluridisciplinaires pour documenter et interpréter les échanges atmosphère-sol-plantes au travers notamment de mesures géophysiques (sismiques notamment), de télédétection et de suivi géochimique avec un échantillonnage mensuel des eaux de surface accompagné d’un échantillonnage plus fin lors des épisodes de crues et de basses eaux.

  • les variations temporelles du prélèvement de l’eau par le couvert végétal :

Avant que l’eau de pluie ne s’infiltre dans la subsurface, une fraction importante de celle-ci est prélevée dans la zone racinaire par les arbres et est retournée à l’atmosphère sous forme de vapeur : c’est la transpiration des plantes. Celle-ci atteint environ 30% à l’échelle annuelle sur les sites du Mont Lozère (calculé à partir des données de la station météorologique de Vialasse). Cependant, derrière cette moyenne annuelle se cache une forte variabilité saisonnière, avec une transpiration prélevant la quasi-totalité des faibles précipitations durant les périodes de fin de printemps et d’été. Un tel prélèvement modifie fortement la chimie de l’eau entrant dans la subsurface, les systèmes racinaires étant capables de “choisir” les nutriments dont ils ont besoin parmi l’eau prélevée, et il est donc important de quantifier de manière fine ces prélèvements.

Pour cela, trois approches complémentaires sont utilisées : des capteurs de flux de sève, un travail de modélisation hydrologique et la quantification des variations de biomasse à l’aide d’outils de télédétection

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Capteur de flux de sève installé sur le mont Lozère © Adrien Majourel - Parc national des Cévennes

 

  • le suivi des éléments chimiques dans les différents compartiments des écosystèmes forestiers :

La géochimie permet de caractériser la composition chimique des rivières et d’être analysée comme messager de l’hydrologie souterraine. En effet, quand l’eau de pluie entre en contact avec les plantes, le sol et les roches, elle se charge d’éléments chimiques. La quantité et le type d’élément chimique varient selon le temps que dure ce contact entre l’eau et les solides situés dans l’environnement, et donc varient selon la vitesse de transit de l’eau entre son point de chute sur les arbres ou le sol, et la rivière.

Inversement, la composition chimique de l’eau dans une rivière, et en particulier ses variations pendant des évènements intenses comme les crues, apportent des renseignements sur le parcours de l’eau dans le sous-sol. De tels évènements revêtent un caractère particulièrement extrême dans les Cévennes, où des pluies très importantes sur des périodes très courtes, peuvent engendrer des crues, et donc des modifications de ces chemins de l’eau souterraine, très rapides.

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Le Pont du Tarn © Olivier Prohin - Parc national des Cévennes

 

Des perspectives de recherche

Bien que la motivation première pour ces initiatives instrumentales soit la recherche académique, la quantification de ces processus est aussi d’intérêt majeur pour mieux comprendre la ressource en eau dans les Cévennes, et contribuer ainsi aux débats quant à sa gestion actuelle et future.

Ces travaux, initiés au cours des dernières années, sont appelés à continuer dans les années à venir. En effet, une partie des données acquises le sont depuis un temps relativement court qui ne permet pas encore d’appréhender toute la variabilité météorologique à laquelle les Cévennes sont soumises (saisons, évènements de pluie, épisodes de sécheresse).
 

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Opération de carottage sur le mont Lozère © Adrien Majourel - Parc national des Cévennes

 

Des retombées sur le territoire

Les recherches menées sur le mont Lozère s’inscrivent dans une démarche de science ouverte, ce qui implique une mise à disposition des données rapide, libre de droit et documentée à la communauté scientifique et plus largement à tous les utilisateurs intéressés. Certaines données, plus exploratoires et/ou innovantes (flux de sèves par exemple) bénéficient d’un embargo qui sera levé à partir de la première publication de l’équipe de recherche à l’initiative de l’expérimentation. Pour toutes les autres données “de base” (pluie, débit, température,...) les données sont disponibles en ligne avec une mise à jour actuellement annuelle et mensuelle en contactant le responsable de l’observatoire.

Dans le contexte actuel de la nécessaire adaptation au changement climatique du territoire, ce jeu de données permet une meilleure interprétation locale des effets globaux généralement disponibles.

D’autre part, une interprétation des résultats de ces recherches peut permettre une meilleure compréhension des processus hydro-climatiques et tout particulièrement sur la ressource en eau de surface et souterraine mais également du lien entre ressource en eau et forêt.

Enfin, ces dispositifs expérimentaux peuvent permettre d'organiser des animations scientifiques et d’éducation à l’environnement autour de ces sites afin de contribuer à une meilleure connaissance de ce territoire par les populations
qui y vivent ou qui y séjournent durant les vacances.

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Animation du Parc national des Cévennes au sommet de FIniels © Adrien Majourel - Parc national des Cévennes

 

Ils/elles participent actuellement aux actions de recherche sur le Mont Lozère :

  • UMR CNRS ESPACE : Pierre-Alain Ayral, Didier Josselin, Jean-Marc Domergue et Nadine Grard
  • IPGP : Julien Bouchez, Antoine Lucas et Éric Gayer
  • Université de L’Illinois : Jennifer Druhan, Celia Aranda Reina et Ivan Osorio-Leon
  • Sorbonne Université : Simon Carrière et Sylvain Pasquet
  • IMT Mines Alès : Valentin Wendling, Anne Johannet et Christian Lopez
  • Géosciences Rennes : Eliot Chatton et Camille Bouchez
  • Parc National des Cévennes : Yannick Manche

Toute l'équipe souhaite remercier le Service National d'Observation OHM-CV et les infrastructures de recherche nationale OZCAR et européenne e-LTER pour leurs soutiens.

 

Pour aller plus loin :


Source URL: https://www3.cevennes-parcnational.fr/actualites/le-mont-lozere-un-site-experimental-pour-la-recherche