Cette photo a été prise dans l'enclos des chevaux de Przewalski par Delphine Descamps-Diereman dans le cadre du programme de baguage des Pies-grièches méridionales (Lanius meridionalis Temminck) sur le Causse Méjean. Ce cliché est rare, on vous explique pourquoi.
Les coulisses de la photo
Delphine a pour mission, au sein du Parc, de travailler sur la sélection d’habitat à multi-échelle de la Pie grièche méridionale. Dans ce cadre, elle participe aux opérations de bagage pour le programme de suivi de l’espèce.
Ce programme vise à répondre à plusieurs questions : les individus reviennent-ils nicher sur les mêmes sites que les années précédentes ? Les couples restent-ils stables dans le temps ? Quelle est la mortalité au sein de la population ?
Ces interrogations sont d’autant plus pertinentes que les études et les données sur cette espèce réputée fidèle à son site de nidification sont rares.
Les pies grièches méridionales sont des oiseaux particulièrement farouches, il est donc difficile de reconnaître leur bague à l’aide de jumelle ou de longue-vue. Mais alors comment faire pour assurer un suivi scientifique et rigoureux ?
La solution consiste à mettre en place des pièges photos dotés d’un support pour attirer les oiseaux. L’appareil prend la photo dès qu’il voit du mouvement, permettant ainsi de reconnaître la couleur de la bague ainsi que le numéro attribué.
Une photo rare et très intéressante !
La photo prise par Delphine est donc exceptionnelle, car il s'agit certainement de la première fois qu'une Pie grièche est photographiée à main levée, en vol et que sa bague est identifiable ! En effet, nous pouvons voir le code couleur des bagues de l'individu. Ici sur la patte droite, une bague rouge et sur celle de gauche, une bague en métal sur du bleu. Il existe une seule combinaison de couleur qui est propre à chaque individu !
Une prouesse qui allie chance et technique. Selon Delphine, passionnée de photographie animalière depuis de nombreuses années, "Il s'agit probablement d'un mâle, impossible à affirmer avec certitude à cette période de l'année, car il n'y a pas de dimorphisme sexuel. On sait différencier les mâles des femelles juste avant la ponte et pendant toute la couvaison, car les femelles ont la plaque incubatrice* apparente à cette période. L'absence de plumes permet à la peau d'être directement en contact avec les œufs permettant ainsi de les maintenir à bonne température (les plumes sont isolantes et ne permettraient pas la transmission de la chaleur corporelle de la femelle). Cette photo va nous permettre de suivre cet individu, d'étudier ses comportements et de mieux comprendre l'espèce."
* plaque incubatrice : zone temporairement dénuée de plumes et de duvets sur la poitrine ou l'abdomen des oiseaux
Quelques mots sur la Pie grièche méridionale
Ce passereau vit uniquement dans les péninsules ibériques et dans le sud de la France. Il fréquente les espaces plutôt ouverts avec la présence d'arbres ou d'arbustes épineux pour pouvoir y faire son nid.
Ses tons sont gris et noir avec toujours une touche de blanc. Son bec est très crochu.
Cette espèce est baguée depuis 2021 au sein du territoire du Parc national et est concernée par le Programme national d'Action (PNA) Pie grièche de 2025-2034. Sur le territoire du Parc, la Pie-grièche méridionale est uniquement présente sur les causses Méjean et Sauveterre où sa population est estimée à respectivement 25-35 et 15-20 couples. Sur ces causses, l'espèce est dépendante des milieux ouverts générés et maintenus par les pratiques agro-pastorales.
Pour aller plus loin :
Rencontre avec une invitée très spéciale - interview (imaginaire) d'une pie grièche méridionale
La Pie-grièche méridionale, une espèce rare à mieux connaître
A17 : histoire d’une Pie-grièche méridionale